Lundi 27 mai, la grève commence. L’Université de Dakar est occupée par 1500 étudiants. L’UDES distribue son mémorandum exposant ses revendications et fustigeant la politique du Président Senghor. Les étudiants font une tournée des établissements du secondaire pour débaucher lycéens et professeurs ; certains sont occupés. Une réunion interministérielle est tenue ainsi qu’une réunion extraordinaire du Bureau Politique National de l’UPS qui réclame l’usage de la force.
Mardi 28 mai, la tournée des lycées et collèges continue. Les étudiants grévistes se rencontrent en masse à l’Université de Dakar. Dans l’après-midi, la police encercle le campus et la Cité universitaire sans y pénétrer. Elle fait de même autour des lycées. La contestation gagne les écoles primaires, de nombreux enfants protestent dans la rue et vandalisent les écoles encore ouvertes. Les autorités choisissent de fermer tous les lycées puis les écoles primaires de Dakar et de Saint-Louis à compter du 29 mai. Un communiqué de la présidence de la République est publié en ce sens.
Durant cette journée, les réunions de négociation se multiplient, impliquant tour à tour le Président, le Conseil de l’Université, l’ambassadeur de France, le ministre de l’Education nationale, les parents d’élèves, les différentes associations étudiantes, l’UPS et son Bureau politique.
Mercredi 29 mai, les étudiants expulsent recteur, enseignants, personnels administratifs des bâtiments de l’université. Les forces de l’ordre consolident leurs positions tout autour et empêchent toute sortie ou entrée. Durant la matinée, elles donnent l’assaut à l’université pour l’évacuer et la fermer. Gourdins, barres de fer, pierres, cocktails molotov, crosses, grenades lacrymogènes sont utilisés dans les affrontements. Les étudiants sont arrêtés : 353 étudiants sénégalais grévistes sont internés dans un camp militaire, des étudiants étrangers expulsés par avion (1 047 au cours des jours suivants).
Sous l’égide du syndicat des enseignants (SUEL), un appel à la grève générale et illimitée est lancé par différents syndicats réagissant à la violence de la répression (l’UNTS, le syndicat des médecins pharmaciens et des chirurgiens-dentistes, des ingénieurs et techniciens, de la fédération nationale des associations de parents d’élèves, etc).
En ville, des groupes de jeunes gens manifestent dans les rues et mettent à sac des habitations, des magasins, s’en prennent aux vitrines, attaquent les autobus et les voitures à coups de pierres ou les incendient. Les lycées en grève de la ville de Thiès sont fermés sur ordre gouvernemental.
Officiellement, ces affrontements conduisent à un mort - Salomon Khoury, étudiant ressortissant libanais - et 69 blessés dont 42 étudiants.
Jeudi 30 mai, dans une allocution présidentielle radio, Senghor, accuse les étudiants de vouloir “faire la même chose [que les?] toubabs”, de “singer les étudiants français sans modifier une virgule." Il rejette les accusations d'obéissance à la France dont il fait l’objet : “C’est justement au nom de ces valeurs de la Négritude, c’est au nom de la défense de l’Indépendance du Sénégal que nous avons arrêté les décisions que l’on sait en matière de bourses”. Il annonce la fermeture de l’université jusqu’à nouvel ordre et accuse à mots à peine voilés la Chine de favoriser la contestation (il en expulse les ressortissants). Très dur avec les étudiants, il se montre ouvert au dialogue avec les travailleurs.
L’état d’urgence est décrété. Le maintien de l’ordre est confié à l’armée sénégalaise. Dans le même temps, Senghor demande le renfort de l’armée française. Un couvre-feu est instauré de 20h à 6h. Les attroupements sur la voie publique sont interdits ainsi que les rassemblements sportifs et culturels.
L’UNTS donne l’ordre de grève générale.
Vendredi 31 mai, à Dakar, la grève est totale et s’étend en région dans les grandes villes de Thiès, Kaolack, Saint-Louis. Des syndicalistes sont arrêtés à la Bourse du travail. S’ensuivent d’importantes manifestations.
A Paris, la Fédération des Etudiants d’Afrique Noire (FEANF), à laquelle appartient notamment Omar Blondin Diop, occupent l’ambassade du Sénégal.
Samedi 1er juin, débutent des négociations. Le gouvernement sénégalais impose une censure officielle sur tous les articles se rapportant au mouvement de contestation sociale.
Les milices paysannes que Senghor fait venir pour tenter de démontrer le soutien de la population au régime arrivent à Dakar.